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Le Blog de JACK NOUDILA

24 juin 2014

Nouvelles d'outre-temps

J'ai abandonné l'écriture de Werewoman, le bouquin dort dans un coin, jamais terminé...

La raison : Je ne suis pas fou. Ce roman aurait pu paraitre... avant.

L'époque est ce qu'elle est. Attendre des temps meilleurs est préférable.

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15 juillet 2012

Retour en vue

Un nouveau vilain texte sous la forme d'une nouvelle à cet emplacement dans quelques temps...

Et puis, un retour après deux ans de silence (ça fait du rien !)

6 septembre 2010

La prédatrice

Le titre de mon prochain roman : La prédatrice. Première partie : Werewoman

Un roman fantastique en cours d'écriture. Je pensais en faire 150 pages, c'est parti pour plus que cela. Donc, un gros livre, étrange et tordu. Peut-être pas à La Girandole, mais chez un éditeur Parisien. Pour la Girandole, un petit opus avec quelques nouvelles. Cette fois-ci sans coquilles, promis, nous avons une bonne correctrice maintenant. En attendant, nous allons sortir le livre de Daniel Henriot : Les graines de Paradis. Sortie en octobre.

Bises à tous

17 juillet 2010

EN VACANCES...

Le blog va dormir quelque peu. Je suis en vacances, c'est à dire en phase d'écriture.

28 juin 2010

Charles

Un texte sur la lâcheté... si courant la politique de l'autruche...

CHARLES

Je m’appelle Jean. Cette nuit, je n’ai pas trop dormi, mais ce n’est pas pour parler de moi que je veux attirer votre attention, c’est pour parler de Charles. C’est devenu un ami. Je l’admire et il m’a sauvé la vie. Quand on est sorti de la tranchée, ce matin-là, les boches avaient installé deux nouvelles mitrailleuses sur le flanc de la colline. On n’avait rien vu dans la nuit. Il pleuvait comme toujours et on s’est lancé à l’assaut. Les balles en ont fauché des camarades, qu’est ce qu’il a pu boire comme sang ce champ ce jour-là. L’assaut a été un échec. C’était il y a un an en 1916. Je suis tombé touché par une balle qui m’a blessé à la jambe. J’ai vu tous les copains faire demi-tour, me laisser seul et abandonner l’assaut. J’ai gueulé, Dieu que j’ai pu gueuler. Et puis, j’ai entendu des pas derrière moi. Des bras puissants m’ont saisi et le type m’a tiré en direction de nos lignes. C’était Charles. C’est comme ça qu’on s’est connu. Ma blessure n’était pas grave et j’ai dû revenir. Je ne sais pas si cela n’aurait pas été mieux si j’avais été amputé. Charles, il parle de tas de trucs que je ne comprends pas toujours. Il parle de Socialisme, d’ouvriers et de paysans ensemble pour faire une révolution. C’est bien gentil tout ça, mais souvent, il me fait rigoler. On voit bien qu’il est de la ville lui. S’il connaissait la campagne, il saurait que nous on n’a pas le temps de se mettre en grève. Et si on faisait grève, qui c’est qui ramasserait nos récoltes ? On a souvent lui et moi de longues discussions à ce sujet. Mais, je l’aime bien Charles. Il a sans doute raison, il sait mieux lire que moi. Il dit que c’est grâce au syndicat qu’il sait bien lire. Sinon, comme nous tous, il a abandonné l’école dès le certificat. Son syndicat, il dit qu’il a monté une bibliothèque. J’aimerais bien moi savoir lire comme lui, mais j’ai loupé mon certificat. En tout cas, je l’admire. C’est presque un monsieur parmi nous, même si c’est un ouvrier et que son grand-père était paysan comme moi. Charles, il aime les bêtes. Il a même apprivoisé un rat qui venait nous voir dans les tranchées. Il lui donne parfois des bouts de ration et c’est devenu la mascotte de notre tranchée. Il dit que ceux d’en face aussi, ils aimeraient bien rentrer, qu’ils sont aussi dans la boue, dans la mort. Charles, il m’aide à faire les lettres pour ma femme. Le petit dernier doit avoir deux ans maintenant. Si je reviens, j’appellerai le prochain Charles. Son seul défaut à Charlot, c’est que parfois, il parle trop de ses trucs de syndicat. Après l’assaut de la semaine dernière qui a été une véritable boucherie, il a dit qu’il ne fallait pas se laisser faire. Je l’aime bien Charles, mais moi j’obéis, j’en fais pas à ma tête comme lui. Il y a une demi-heure, Charles était devant moi. Je n’avais pas envie, mais j’avais un ordre. Alors, j’ai fait comme tous les gars du peloton, j’ai appuyé sur la détente et Charles s’est écroulé dans la boue.

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19 juin 2010

Chronique du jour

En passant par mon bar préféré (normal ! c’est le seul) de mon patelin, je suis tombé sur le gros titre d’un quotidien de Province dont je tairais le nom par pudeur qui disait ceci :

Crise, foot et météo
Halte à la déprime

La veille, j’avais pu voir au bord de la route un énergumène qui agitait un drapeau (vraisemblablement piqué le 6 juin)  et qui était couvert d’une perruque jaune paille.  Il  hurlait.

J’ai conclus qu’il était en crise, et cela à cause du foot. A cette heure, il a du retrouver ses esprits.  Le lendemain d’une crise, on tombe souvent dans une déprime.

Il y a un truc que je n’ai pas compris :

Que viens faire la météo là-dedans ?

8 juin 2010

ROUGE, OR ET SAFRAN (Voir Pasiphae et autres nouvelles du prix Hemingway 2006 Le diable Vauvert)

1 La mort d’un sage

 

 

Lorsque le lama Rimpoche T Labsang Souchong mourut dans son petit monastère du Népal, près de la frontière avec le Tibet, il arborait un sourire satisfait. Il faut dire que ce moine était un incorrigible optimiste. Lorsque les chinois avaient envahi le Tibet, alors que la plupart des gens fuyaient, il était resté à sourire face à l’armée jeune et excitée qui détruisait tout sur son passage. Il avait ensuite subi la révolution culturelle puis, après de longues années de rééducation, il avait réussi à franchir la frontière pour aller au Népal, plus tranquille. Là, il avait pu trouver un monastère qui l’avait accueilli. Il avait alors vécu une vie sans reproche, une vie de sage parfait. Les gens qui le connaissaient n’en doutaient pas, le lama Rimpoche T Labsang Souchong était un Bodhisattva, un sage qui allait enfin rejoindre le Nirvana, le détachement ultime loin des souffrances terrestres. Lui-même n’en doutait pas non plus, il était un incorrigible optimiste, il savait que son karma était bon, il avait vécu de façon exemplaire. A sa mort, il s’endormit paisiblement, le sourire satisfait de la réussite sur son visage.

 

Malheureusement, dans son passé de jeune moinillon, un évènement qu’il avait depuis longtemps oublié, oblitérait sérieusement sa sortie du cycle des réincarnations. Il avait une fois, animé par la curiosité et l’impétuosité de la jeunesse, osé goûter de la viande, manger d’un être vivant animé.  Ce n’était pas grand-chose, juste une bouchée qu’il avait subrepticement pris dans l’assiette de son voisin de table. Les conséquences en furent terribles, le lama Rimpoche T Labsang Souchong avait encore une réincarnation à faire s’il voulait rejoindre le Nirvana. C’était ainsi la dure loi du cycle des réincarnations.


 

2 Le premier combat

 

Le démon apparut soudainement, devant lui. Tout d’abord, il n’avait pas fait attention, se demandant ce qu’il faisait là, cherchant une raison à sa présence dans ce lieu étrange qu’il ne connaissait pas. Et l’horrible créature était apparue là, juste devant ses yeux. Il soupira et pensa :

« Je pensais avoir mené tous les combats contre les démons et en voilà encore un, Mara ne veut décidément pas me laisser tranquille. »

Il se souvint de son dernier combat contre un envoyé de Mara. C’était au temps où les chinois avaient envahi le Tibet. Affaibli par les privations et les mauvais traitements, le monstre lui était apparu de nuit. Toute la nuit, il l’avait combattu courageusement pour finir par en triompher au petit matin. Il avait alors compris que ce démon était sa propre colère contre les envahisseurs. Mais là, aujourd’hui, qui donc pouvait être cette nouvelle créature ?

En habit de lumière, le démon fixa Rimpoche T Labsang Souchong d’un regard scrutateur. Il devait être là pour le tester, pour lui interdire l’accès au Nirvana. Le lama sut que ce combat serait son dernier combat. Il savait qu’il devait se battre sans se laisser envahir par trop de colère s’il voulait triompher du démon. S’il perdait et laissait les émotions l’envahir au point de perdre son contrôle, il était bon pour une dizaine de réincarnations de plus et, il ne voulait surtout pas cela. Cela commençait à le lasser toutes ces vies supplémentaires. Cependant, il était un incorrigible optimiste et il savait qu’il mettrait le démon en fuite.

Ce dernier commença à tourner autour de lui, lui disant des choses qu’il ne comprenait pas. Rimpoche attendait une faiblesse de son adversaire, un simple instant d’inattention où il pourrait frapper en premier. Un court instant, il vit les yeux du démon cligner. Celui-ci avait le soleil de face. Ce fut le moment que choisit le lama pour foncer tête baissée.

« Commence donc par me prendre un bon de coup de boule mon gaillard, tu vas comprendre à qui tu as affaire. » Pensa-t-il.

Il sentit sa tête pénétrer le corps du démon, mais au moment même où il eût cette sensation, ce fut comme si le démon avait disparu, sa tête ne rencontra que l’étoffe de son vêtement.

« Il utilise de la magie pour se déplacer. »

Les pensées se bousculaient dans la tête de Rimpoche. Il poursuivit sa course emporté par l’élan pour se retourner plus loin, hors de portée du démon.

Au léger sourire du démon en habit de lumière, il vit bien qu’il ne l’avait pas touché. Le lama trouva que le monstre se foutait un peu trop de sa gueule. Il cracha par terre car quand lama fâché, toujours faire ainsi. Il rechargea. Encore une fois, sa tête ne rencontra que le vide pendant que du public montait une clameur.

Il s’arrêta et repensa à ses combats passés. Une fois, Mara lui était apparu, lui conseillant de goûter un peu à un bon plat de porc comme le faisait le chinois du village voisin. Ce jour là, le lama Rimpoche T Labsang Souchong dormait sous un arbre près de la rivière. Il avait oublié de manger son riz et Mara avait profité de sa faiblesse pour lui apparaître en rêve sous la forme de la faim. En bon lama, il avait combattu le démon en utilisant la meilleure arme qu’il avait. Il avait crié « Pars ! Tu n’es qu’illusion », faisant sursauter de pacifiques pêcheurs qui se trouvaient en face de lui de l’autre coté de la rivière. Mara avait alors disparu et le lama était rentré se sustenter en riz au village. S’il avait cédé, rien qu’une fois, pour chaque bouchée de viande, il était bon pour une réincarnation supplémentaire. 

Il arrêta de penser pour se retrouver dans l’arène face au démon qui l’attendait. Sur la gauche, un autre démon venait d’apparaître, toujours habillé de ce costume violemment coloré et doré. Le démon criait, l’excitait. Il repensa au combat du bouddha contre l’armée de Mara au moment où celui-ci était près d’atteindre l’illumination. Pour vaincre les démons, il avait touché le sol du bout des doigts de la main droite et la déesse de la terre l’avait aidé. Rimpoche fit de même en grattant le sable de sa patte avant droite. Il chargea à nouveau, mais pendant qu’il chargeait, il vit que son adversaire se coulait dans un mur pour disparaître, il obliqua brusquement sa course pour attaquer le démon de gauche. Il vit celui-ci disparaître dans le mur avant qu’il ne puisse l’atteindre. Il était seul.

Il jubila « Victoire ! Ce vieux truc marche encore. »

Les démons étaient vaincus. Il put alors à loisir examiner l’endroit étrange où il se trouvait. C’était un étrange cercle entouré de murs. Sur le sol, il n’y avait pas d’herbe, juste du sable.

Une réflexion lui vint : « C’est un cercle magique. »

Il se souvint alors de ses lectures au monastère. Celles des livres que laissaient de jeunes occidentaux barbus et chevelus qui étaient venus étudier le grand véhicule par lequel on pouvait s’approcher de la voie du Bouddha. Cela le fit sourire, beaucoup de ces jeunes arrivés au début des années 70 étaient américains. Comme il comprenait l’anglais, il avait beaucoup discuté avec ces curieux visiteurs qui lui avaient laissé des livres en souvenir. Il avait essayé de comprendre les croyances de ces occidentaux qui lui paraissaient si bizarres. La raison de ce syncrétisme qu’ils représentaient.


 

3 Les dragons

 

C’est à ce moment que retentit à nouveau la trompette qu’il avait entendue auparavant dans son toril. Immédiatement, par association d’idée, il repensa vaguement à un ouvrage religieux occidental qu’il avait lu :

« Lorsque l’agneau ouvrit le premier sceau, je vis apparaître un cavalier… »

Apparurent les démons, certains montés sur des dragons. Le lama comprit que ce n’était plus de la rigolade. Il lui fallait défendre chèrement sa peau.

« Décidément, on ne peut pas être tranquille plus de cinq minutes. » Pensa-t-il. C’était la première fois dans sa vie qu’il avait à combattre des dragons. Il décida de ne pas leur laisser d’initiative. Il regratta le sol, puis tête baissée, chargea celui qui était le plus près de lui. Au moment ou il allait atteindre le dragon, celui-ci pivota habilement mené par le cavalier et évita la tête du lama. Il sentit une douleur fulgurante lui traverser le museau et il s’éloigna au plus vite.

Il savait que c’était un combat à mort. Il lui fallait combattre, car les démons étaient décidés à le tuer. Il chargea un autre dragon à sa droite. Avant d’arriver au monstre, il releva un court instant la tête et s’aperçut que ce qu’il avait prit pour des dragons étaient des chevaux déguisés en dragon. Cela lui donna du courage en même temps qu’il se sentit vaguement gêné. Tuer un cheval, ce n’était pas bon pour son karma. En même temps, ces chevaux étaient aux ordres des démons. Il ne savait que faire dans ces cas là.

Il n’eut pas à réfléchir longtemps, les chevaux se rapprochaient de lui. Sa blessure lui faisait mal. Il chargea. S’il faisait chuter le cheval en le blessant un peu, le démon qui le montait serait en mauvaise posture. Et il pourrait lui régler son compte. Il arriva à la hauteur du cheval, mais le cavalier sut l’éviter au moment où il arrivait. Une autre sensation de douleur lui vrilla le cou. Il voulut relever la tête, mais la douleur l’en empêcha.

Un autre cheval arrivait, il vit la lance que tenait le démon et put l’éviter. Il s’éloigna, un peu. Les chevaux se rapprochèrent et il dut essuyer de nouvelles blessures. Il combattait pourtant sans se soucier de la douleur, en lama bien entraîné.

Son courage désespéré finit par porter ses fruits. Au bout de quelques minutes, tous les chevaux et démons disparurent.

Le lama savait qu’il perdait du sang, il commençait à se sentir fatigué, mais la disparition des envoyés de Mara fut pour lui le signe qu’il avait vaincu. Il pourrait enfin se reposer et se remettre de ses blessures.


 

4 Le lama fâché

 

Rimpoche T Labsang Souchong était vraiment un incorrigible optimiste car résonna à nouveau la trompette.

Cette fois-ci les démons étaient à pied. Cela le ragaillardit, et malgré sa fatigue, il attaqua à nouveau.

Il s’aperçut que ces démons étaient différents des autres, leur uniforme était tout aussi coloré, mais l’argent dominait et non pas l’or comme précédemment. Ils étaient de véritables acrobates qui évitaient son attaque au dernier moment. A la troisième attaque, il sentit dans son dos la douleur des harpons qu’on lui planta.

« Ce n’est pas du jeu. » Pensa brièvement le Lama avant de recommencer à charger. Il cracha au passage un peu de sang car quand lama fâché, toujours faire ainsi. Le démon tenait ses harpons colorés et évita facilement la charge. Les banderilles se plantèrent à nouveau dans son dos, mais l’une d’elles mal fichée tomba sur le sol.

« Dire que pour être sûr de ne pas bouffer de la viande au cours de ma dernière réincarnation, je me suis réincarné en paisible ruminant. » Soupira le lama. « Et voilà que Mara m’envoie toutes ses hordes de démons. Voilà une sacrée mise à l’épreuve. »

La dernière charge du ruminant épuisé sur un démon se termina comme les autres, et un dernier harpon lui fut planté dans le dos, le second glissa sur son cuir.

Après quelques minutes, épuisé, sentant que c’était la fin, le lama resta un moment immobile, ensanglanté sous le soleil. Il sentit soudainement qu’il était seul.

« J’ai vaincu encore ceux-là, mais ne je pourrais pas tenir un round de plus, sinon c’est la fin. »

Alors retentit la dernière trompette.


 

5 Le dernier combat

 

« Bouddha, je t’ai dit que je n’en tiendrais pas quatre comme ça. Aide moi, donne moi ta main pour sortir de cette arène. » Soupira le lama Rinpoche.

Il n’y avait plus qu’un seul démon dans l’arène. Celui-ci, sans quitter de l’œil le lama faisait un rituel que Rimpoche ne comprit pas. Au bout d’un moment, le démon se retourna vers lui. Rimpoche vit la cape et l’épée que tenait le démon. Il comprit que c’était là son dernier combat.

Lui ou le monstre, de toute façon cela n’avait aucune espèce d’importance, il était sûr d’atteindre le Nirvana au bout. Il avait mené sa réincarnation de façon exemplaire. A aucun moment, la colère ne l’avait aveuglé.

Le combat dura brièvement avec les charges désespérées de Rimpoche qui se terminaient par un évitement adroit de la part du démon. Epuisé, le lama tenta une dernière charge.

Lorsque le lama sentit l’épée s’enfoncer dans son corps, il comprit que son existence terrestre était terminée. Il s’écroula dans l’arène un peu plus loin, emporté par l’élan. En agonisant, il eut quand même la pensée que enfin, il allait atteindre le Nirvana. Lama, il avait commis l’erreur de jeunesse de goûter à de la viande de bœuf, cela lui avait coûté une réincarnation en l’animal qu’il avait mangé, il était devenu taureau. Maintenant, il pouvait partir en paix.

Le taureau mort dans l’arène, le matador remercia la foule, puis comme celui-ci s’était battu vaillamment, il eut droit aux oreilles et à la queue, honneur suprême. Des chevaux vinrent chercher la dépouille du taureau qui fit le tour de l’arène.


 

6 Un incorrigible optimiste

 

Le lama Rimpoche T Labsang Souchong était un incorrigible optimiste. Une des années précédentes, il avait fait une sécheresse terrible et l’herbe se faisait trop rare. L’éleveur peu scrupuleux lui avait alors donné ce que l’on donnait en principe à l’époque aux ruminants à destination de la boucherie : Des farines animales. Cela pendant trois mois. Le lama Rimpoche T Labsang Souchong avait donc droit encore à quatre mille trois cent soixante dix huit réincarnations avant d’atteindre le Nirvana. Mais comme c’était sous forme de mouton, il avait quelques chances de ne manger que de l’herbe au cours de ces réincarnations futures. Encore que les méthodes d’élevage risquaient évoluer avec les siècles, et alors là...

Au cours des années suivantes, dans le monde un peu partout apparaissait de temps en temps un mouton qui n’arrêtait pas de cracher. « Quand lama fâché… »

8 juin 2010

Retour sur présente absence 2

Genèse des structures mentales

 

Tout ce que nous vivons, ce que nous ressentons par nos sens, ce que nous imaginons est traité en finalité dans notre système nerveux central. Ce système n’existe pas chez les branches les plus anciennes des animaux et n’existe pas chez les végétaux actuels (pour des raisons de croissance et de structure). Il se complexifie au fur et à mesure de l’apparition de nouvelles formes évolutives pour arriver jusqu’à nous. Grosso modo, en schématisant à l’extrême, le premier stade contrôle les fonctions vitales (bien que le cœur puisse être en partie autonome) et les réflexes telle la respiration. Le système secondaire contrôle davantage les émotions (peur et agressivité) sous une forme de réflexes liés à l’expérience. Expérience signifie une première mémoire. Le troisième étage, plus élaboré utilise une mémoire plus complexe et permet le choix, c'est-à-dire une analyse plus complexe de la situation. Qui dit choix dit imagination.

En l’absence d’imagination, il n’y a pas de choix possible.

Ces systèmes ne correspondent pas forcément à des zones précises du cerveau. L’évolution a en effet modifié ces systèmes dans les différentes branches animales et les termes chers à Henri Laborit de paléocéphale, système limbique et néocortex sont aujourd’hui évités, car trop réducteurs. Les nouveaux termes fonctionnels employés (cerveau reptilien, limbique et néocortex du cerveau triunique sont hélas trop anthropomorphistes).

Dans notre imagination humaine, voire celle des mammifères (ici nous nous cantonnerons aux humains, le reste est un sujet problématique), les trois systèmes influencent directement ou indirectement le comportement. Le système sur lequel nous pouvons agir directement est bien sûr le troisième système, quoique… affamer quelqu’un, ou le priver de sommeil, permet de modifier son comportement de façon profonde. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

 Le système de base est donc l’imagination. Cette imagination est en grande partie responsable de notre comportement et de nos choix. Ces choix sont mémorisés et la mémoire de ces choix joue un rôle fondamental.

Tout nouveau choix se construit à partir des choix précédents.

Nous avons dit plus haut que la perception de la réalité était toute subjective. Si on appelle réalité les phénomènes physiques ressentis dans notre monde, cette réalité va jouer un rôle plus ou moins grand dans la pensée, suivant les individus.  C’est ce que j’appellerai la structure mentale. Celle-ci se construit dès le début du fonctionnement du système nerveux jusqu’à un âge variable suivant les individus à partir duquel il n’y a plus construction, mais utilisation systématique. Et c’est là que l’on retrouve le vieil adage parlant des mâles, mais pouvant englober tous les sexes : Avec l’âge, les raideurs se déplacent.

La structure mentale est donc en quelque sorte la représentation du monde.

Celle-ci n’est pas fixe tant qu’elle se construit, mais peut évoluer de façons différentes. La classification des structures mentales est donc, pour les jeunes, qu’une donnée dynamique. Cependant, plus on avance dans l’âge, plus il est difficile de s’en construire une autre. Cela a été remarqué depuis longtemps et les écoles, principalement religieuses, savent tirer parti de cette propriété de plasticité chez les plus jeunes.

Éléments jouant un rôle dans les structures mentales :

Innés ou non lié à la culture :

- L’influence de la constitution du cerveau

- L’influence du corps

- Les autres influences pouvant jouer un rôle

Acquis :

- Les comportements de groupe

- La notion de relativité

- La culture

Ce qui n’est pas du domaine de l’acquis est étudié en partie par les neurophysiologistes, éthologues, etc. Nous laisserons ceci de côté.

5 juin 2010

L'ange gardien (paru dans CCS info)

L’ANGE GARDIEN

 Sonia est revenue de Paris il y a une semaine, après trois longues semaines d’absence. Ce matin, je l’ai surprise en train de mettre dans un carton tous ses vieux bouquins d’ésotérisme. Il y avait celui avec lequel on s’est connu. Elle m’a avoué qu’elle avait pris ces distances avec ce genre de conneries. Je n’ai rien dit et l’ai laissé porter le carton à la benne à ordure. Elle a rajouté en riant :

 — Et ne me parle plus de ton ange gardien, je t’en supplie.

L’ange, j’en ai entendu la voix pour la première fois lorsque j’étais en panne au bord de la route dans un endroit désolé grillé par le soleil. Une voix qui semblait venir de juste au dessus de ma tête. Douce, de sexe indéfinissable, elle m’a dit comment dépanner la voiture. Et j’ai pu repartir. En conduisant, je réfléchissais à la voix que j’avais entendue, mais n’ai pas trouvé d’explication satisfaisante.

J’avais fini par dire à Sonia que j’avais une sorte d’Ange gardien dont j’entendais la voix, sans ajouter trop de détails la concernant directement. On en parlait souvent, mais depuis qu’elle a jeté les livres, il n’était plus question d’aborder le sujet. De plus, l’ange est resté étrangement silencieux jusqu’à ce soir.

La seconde fois, qu’il m’a parlé, ce fut un dimanche de septembre. J’allais au marché aux livres dans une ville voisine. Je m’ennuyais beaucoup comme célibataire, et il était difficile de faire une rencontre fructueuse dans cette région perdue. Aussi, je passais mes soirées à lire, détestant la télévision que de toute façon je n’avais pas. Le marché aux livres se tenait sur une petite place aux arcades qui protégeaient du soleil les terrasses des cafés. Au milieu, en plein cagna, les malheureux marchands se relayaient entre terrasse fraîche des cafés et fournaise du stand. J’avisais une charmante brune que je n’avais jamais vue auparavant. Elle était juste devant moi, sur l’autre allée à discuter du prix d’un bouquin qu’elle tenait à la main et semblait hésiter. La voix venue d’en haut se fit entendre de façon autoritaire :

 — Elle va aimer ce livre, mais pour qu’elle l’achète, il faut que tu lui dises qu’il est le meilleur de cet auteur. Le vendeur peut baisser de moitié. Va la voir !

Je suis ordinairement timide et aborde rarement des inconnus, mais je me suis senti obligé de passer dans l’autre allée et de m’approcher d’elle en lui disant :

 — Il est excellent, c’est son meilleur, vous ne le regretterez pas.

 — Mais il est cher

 — Marchandez ! Dis-je à mi-voix pour que le marchand ne m’entende pas. Il vaut la moitié de ce qu’il en demande.

Puis, je m’éloignais, embarrassé. Je m’étais aperçu en jetant un coup d’œil sur la couverture que l’auteur m’était parfaitement inconnu.

Je me mis à la terrasse d’un café plus loin et la cherchait des yeux, elle avait disparu. Tout en sirotant mon pastaga, je commençais à trouver bizarre d’entendre des voix comme cela. La fille était belle et je sentais que j’aurais pu continuer la discussion. La timidité est une foutue maladie. Et j’étais perplexe quand à l’origine de cette voix. Elle était tellement réelle. Il n’y avait jamais eu de cas de schizophrénie dans ma famille, et je n’avais nulle envie d’être le premier.

Le lendemain, je retournai dans cette même ville, car c’était le seul endroit où trouver un boulanger ouvert. Il devait être presque midi et il n’y avait plus de pain. Je sortais dépité.

Encore des nouilles au menu de midi. J’étais sur le pas de la porte de la boulangerie quand la voix me dit d’aller m’asseoir en terrasse sur cette même place où avait eu lieu le marché la veille. Comme un robot, j’obéis. Jusqu'à présent, cette voix ne me portait pas tort. Pendant que je marchais dans les rues presque désertes en direction de la place, je me posais des questions quand à l’origine de cette voix.

 — Je suis ton ange gardien !

La réponse venue de nulle part me fit sursauter. Malgré moi, à voix haute je répétais :

 — Un ange gardien ?

 — Oui. Va t’asseoir en terrasse et laisse faire les choses.

La voix se tut et j’arrivai sur la place. Le café venait d’ouvrir. J’étais le premier client. Je commandais une noisette.

Je ne l’ai pas entendue arriver. Elle est venue de derrière moi et je l’ai entendue dire :

 — Je peux m’asseoir ?

Je me suis retourné. C’était elle, la fille de la veille. Elle avait un grand sourire. Je lui ai désigné la chaise en face de la mienne.

 — J’ai déjà entièrement fini le livre que vous m’avez conseillé. Je n’ai jamais rien lu d’aussi passionnant. J’en ai oublié de dîner hier. Vous avez l’air de vous y connaître.

Je bredouillais en mentant comme un ministre :

 — Je l’ai lu il y a longtemps, mais il m’avait beaucoup marqué. Mais je dois vous avouer que je lis tellement de choses que je ne me souviens plus exactement de quoi il parle.

 — Des anges gardiens. C’est un très beau livre. Je vous remercie.

Je changeais brusquement de conversation pour éviter ce terrain glissant.

 — Vous êtes de passage ?

 — Non, je suis nouvelle arrivante. Je fais un stage d’ébéniste. Je sais que ce n’est pas très courant pour une femme, mais je veux me spécialiser en création de meubles d’art. Je loue un studio ici. C’est ma première journée. Vous habitez ici ?

La conversation suivit son cours, elle commanda un sandwich avec une boisson, puis vers une heure prit congé de moi. En ce peu de temps, elle m’avait donné son téléphone et m’avait invité chez elle prendre le thé le samedi suivant. On avait l’impression de bien se connaître.

Je suis rentré chez moi troublé. Mon ange gardien me plaisait vraiment.

Au cours de la semaine, j’entendis une fois la voix en voiture. C’était à la tombée de la nuit et j’allais aborder un virage en étant pressé. La voix me dit :

 — Ralentis !

Je freinais. Dans le virage traversa alors l’air de rien un troupeau de sanglier. Il n’y avait plus de doute, la voix était bien celle de mon ange gardien. C’était proprement incroyable.

Le samedi suivant, à cinq heures, j’allais prendre le thé dans son petit studio. Après le thé qui dura longtemps, ce fut l’apéritif et elle m’invita à rester dîner. Je la vis préparer la cuisine pendant que je buvais un dernier Martini. Elle était magnifique cette fille, mais j’étais trop timide pour oser brusquer les choses. J’entendis la voix à nouveau qui me dit :

 — Lève-toi !

Je me levais.

 — Va vers elle et ne dis rien.

Elle me tournait le dos en train de remuer la préparation pour les lasagnes. J’avançais en silence et arrivais derrière elle.

 — Mets-lui une main au cul !

Là je trouvais que la voix avait du culot pour un ange et me mis à trembler. La voix continua :

 — Fais ce que je te dis. Je suis ton ange gardien.

J’avançais la main et la posais sur ces fesses, sûr de me prendre une tarte en retour. Elle ne réagit pas. La voix se fit à nouveau entendre :

 — Caresse là idiot !

 Je commençais à caresser les adorables rondeurs tout en tremblotant. Elle posa la cuillère de bois dans la sauteuse, se retourna, prit ma tête entre ses mains et à ma grande surprise, en faisant un petit sourire, m’embrassa. Puis elle me dit :

 — Tu as mis le temps. Va t’asseoir, c’est presque prêt.

Cette nuit-là, je ne suis pas rentré chez moi.

La voix m’a accompagné pendant toutes les semaines qui ont suivi. À chaque fois, elle me disait quoi faire dans une situation périlleuse où simplement pour m’attacher davantage à Sonia (c’était le nom de ma nouvelle compagne). Lorsque je lui ai dit que j’avais mon ange gardien personnel, ce fut une longue nuit de discussion.

Il a fallu qu’elle parte faire ce stage à Paris, elle n’avait pas le choix. Trois longues semaines d’absence.

Ce soir, la voix m’a ordonné de jouer à des jeux érotiques avec Sonia en l’attachant sur le lit avec ses foulards de soie qu’elle porte l’hiver. J’ai fait ce que mon ange gardien voulait. Il m’a dit de me placer derrière elle. Facile, le lit ne touche le mur que sur un côté. J’ai obéi. Maintenant, il me reste un foulard à la main. La voix m’avait ordonné d’en prendre cinq et m’avait dit d’attacher pieds et mains aux montants du lit. Une fois derrière je ne sais pas quoi faire, mais j’entends à nouveau distinctement la voix autoritaire de mon ange gardien. Il dit simplement :

  — Étrangle-la.

5 juin 2010

Le bucheron et la fenêtre

Le mois dernier, je vais chez le marchand pour acheter une nouvelle tronçonneuse, l’ancienne ayant rendu son âme. En effet j’ai du bois à faire et étant seul, je ne vais pas attaquer à la scie des troncs de 30 cm de diamètre et de 1 m de long pour les couper en 50.

 Je commence à couper mon bois dès que j’ai du temps de libre. L’engin fonctionne à peu près correctement, excepté que la chaîne n’est pas compatible avec mon ancienne tronçonneuse, ni les divers accessoires que j’avais, comme toujours… J’arrive à couper pendant 30 jours la moitié de mon bois.

Le trente et unième jour, la tronçonneuse refuse de démarrer !

Je repars chez le marchand mon engin sous le bras, passablement embêté. Le type me regarde et me demande :

— Vous avez validé votre tronçonneuse ?

— Pardon !

— Si vous ne validez pas dans les trente jours votre tronçonneuse auprès du fabricant, elle s’arrête. Il y a dedans un mécanisme qui l’empêche de fonctionner.

— Et vous ne pouvez pas le bricoler ce mécanisme ?

— Ce serait de la contrefaçon. Le constructeur a mis cela pour protéger ses tronçonneuses. Vous êtes sûr d’avoir une vraie tronçonneuse et pas un modèle de contrefaçon qui vous apporterait des ennuis.

— J’ai pas de temps à perdre. Et comment valide-t-on cette tronçonneuse ?

— En découpant le bon qui est à découper dans le « Chasseur Français », dans le numéro spécial qui est offert pour tout nouvel abonnement d’un an. C’est marqué dans votre mode d’emploi. Vous ne l’avez donc pas lu ?

 — Heu non. Il n’y a pas d’autre moyen ? Je m’en fous moi du « chasseur français », je ne suis pas chasseur. Et puis j’ai pas envie de m’abonner à quoi que ce soit. Vous avez peut-être une photocopie de ce bon ?

— Les photocopies ne marchent pas, il faut l’original.

Je suis rentré désappointé avec le sentiment de m’être fait arnaquer.

 

Cette histoire vous paraît une fiction ?

 

Et bien pas tout à fait, j’ai juste changé quelques noms !

 

Résumons :

J’ai besoin d’un outil et je l’achète. Au bout de 30 jours, cet outil s’arrête de fonctionner. Pour qu’il puisse continuer à fonctionner, je dois le « va-li-der ».

Pour le valider, je dois prendre un abonnement à un truc qui n’a aucun rapport avec mon outil, alors que ce truc je n’en n’ai pas besoin. Tout ce que je veux, c’est me servir de mon outil que j’ai acheté. (Ici couper du bois).

Cette histoire vous paraît une fiction ?

Plus tout à fait maintenant. Je pense que vous avez compris. Pour ceux qui n’auraient pas tout à fait compris, je vais préciser le résumé que je viens de faire aux deux derniers paragraphes.

Je répète les paragraphes :

J’ai besoin d’un ordinateur et je l’achète. Au bout de 30 jours, cet outil s’arrête de fonctionner. Pour qu’il puisse continuer à fonctionner, je dois le « va-li-der ».

Pour le valider, je dois prendre un abonnement à internet, alors que je n’en n’ai pas besoin. Tout ce que je veux, c’est me servir de mon PC que j’ai acheté.

Précisions encore :

J’ai besoin d’un ordinateur et je l’achète avec Windows 7 (tous mes programmes sont PC et je n’ai pas les moyens d’acheter un mac). Au bout de 30 jours, Windows 7 s’arrête de fonctionner. Pour qu’il puisse continuer à fonctionner, je dois le « va-li-der ».

Pour le valider, je regarde si on peut le faire par téléphone : NON ! Que par internet.

Je dois prendre un abonnement à internet, alors que je n’en n’ai pas besoin. Tout ce que je veux, c’est me servir de mon PC que j’ai acheté pour bosser et qui est dans un lieu non équipé d’internet et que je ne veux pas équiper, car je ne vais pas payer des charges fixes dans ce lieu.

Alors l’histoire de la tronçonneuse ? Elle vous paraît toujours débile ?

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